La fonction de la musique à l'image

lecteur à bandes
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La fonction de la musique à l’image est le rôle qu’elle joue dans l’ensemble de l’œuvre principale (qu’elle soit un film, une publicité, un jeu vidéo, etc.). Celle-ci va déclencher un effet sur le spectateur et c’est souvent la recherche des effets qui détermine le choix de la musique.
La littérature scientifique sur ce thème est importante et chaque publication vient modifier les classifications précédentes. Nous détaillerons ici quelques notions à titre d’exemple plutôt que dans un objectif d’exhaustivité.

Reprenant la classification établie par Zofia Lissa dans Ästhetik der Filmmusik, Philipp Tagg développe dix fonctions non mutuellement exclusives de la musique à l’image :
1. Marquer le mouvement
2. Marquer les sons réels
3. Représenter le lieu de l’action
4. Musique source
5. Commentaire
6. Exprimer les émotions de ses acteurs
7. Guide émotif pour l’auditoire
8. Symbole
9. Anticiper une action subséquente
10. Tracer la structure formelle d’un film

Les trois premières fonctions ont un rôle très narratif : la musique est un accompagnement qui permet d’identifier, de souligner ou de caractériser des actions et des contextes géographiques, historiques, sociaux, etc. La musique y est porteuse de sens mais aussi valeur ajoutée, concept défini par Michel Chion comme : « Valeur sensorielle, informative, sémantique, narrative, structurelle ou expressive qu’un son entendu dans une scène nous amène à projeter sur l’image, jusqu’à créer l’impression que nous voyons dans celle-ci ce qu’en réalité nous y audio-voyons. »

La narration est aussi au cœur de la dixième fonction, appelée également fonction de leitmotiv. Le leitmotiv est souvent une petite figure associée, par exemple, à un personnage ou une situation dont elle est la représentation. Sa répétition voire sa modification permettent de souligner une structure. Le leitmotiv est aussi utilisé pour les « musiques thèmes » qui relient, par exemple, plusieurs films ou épisodes d’une même série.
Cette approche cognitive fait appel à l’effet mnémonique : la répétition de l’écoute entraine la reconnaissance qui permet à la musique d’agir comme stimulus émotionnel sur l’auditeur. Dans une perspective plus générale, l’effet mnémonique est à l’origine du recours à des formules génériques et au réemploi de certaines musiques d’une œuvre à l’autre.

La musique source est aussi appelée musique d’écran ou musique diégétique. La diégèse est le récit, l’univers de l’histoire. Le concept est utilisé pour catégoriser la musique à l’image :
- la musique diégétique (intradiégétique) est la musique qui fait partie du récit, en étant par exemple audible par ses personnages ;
- la musique non diégétique (extradiégétique) est extérieure à la fiction et n’est audible que par les spectateurs. Elle est aussi appelée musique de fosse par Michel Chion, en référence à l’opéra. On identifie également la technique de l’underscoring qui consiste à souligner l’action via une musique d’ambiance faite pour n’être perçue qu’inconsciemment ou presque par le spectateur.

La fonction de commentaire permet de prendre du recul sur les images et de leur accoler un discours parallèle via la musique qui est déjà un langage en soi. Ainsi, le contrepoint consiste à créer une discordance entre les images et la musique afin de susciter une réaction chez le spectateur.

La sixième fonction, exprimer les émotions des acteurs, ne se résume pas uniquement à souligner ce qui est vu à l’écran : un personnage devant rester impassible peut-être intérieurement bouleversé. Dans ce cas, la musique est un vecteur idéal pour transmettre l’information au spectateur. De la même manière, la fonction de guide émotif pour l’auditoire peut-être utilisée pour donner au spectateur un point de vue différent de celui des personnages visibles à l’écran et n’est pas limitée à la technique décriée du mickeymousing. Le mickeymousing dont le nom vient des premiers longs métrages d’animation de Disney, consiste à utiliser la musique comme paraphrase des images. La musique, souvent très référencée, ne fait que renforcer ce qui est vu et cela peut créer une redondance trop importante.

La fonction symbole est utilisée pour représenter à l’audience quelque chose qui n’est pas directement visible à l’écran, que ce soit un protagoniste absent, un lieu ou un concept.

L’étude des différentes fonctions de la musique à l’image vient historiquement des musiques de films, mais les types plus récents de synchronisations offrent de nouveaux contextes et donc de nouvelles notions. La publicité a souvent cherché à susciter un effet mnémonique chez le spectateur et a notamment répandu le jingle. Aujourd’hui, elle peut utiliser la musique pour se différentier de ses concurrents. Le jeu vidéo apporte quant à lui des questions liées à l’interactivité du joueur sur l’image et la musique. La gestion de l’espace a pris la place de celle du temps mais le leitmotiv y tient toujours un rôle important. Le rôle du sound design y est aussi renforcé, et cela a à son tour influencé le cinéma.